[Report] Hellfest 2023 (samedi 17 juin)

Samedi 17 juin :

Les Indiens de Bloodywood sont typiquement le genre de groupe qu’adore le public du Hellfest. Du metal accessible à cheval entre nu metal et metalcore, une grosse touche d’exotisme apportée par des instruments traditionnels en plus. Il n’en faut pas plus pour enflammer le pare-terre de la Main Stage 2, même à 12h30. On ne va pas cracher dans la soupe puisque leur set s’avère très sympathique à défaut de marquer réellement. Et, au passage, ce seront les seuls sarouels qu’on verra du festival, preuve si besoin était que le Hellfest est devenu vraiment trop cher. Mais vu la foule que draine Bloodywood à cette heure-là, on n’ose même pas imaginer ce que ce sera à la Temple ce soir quand les Mongoles de The Hu feront une démonstration de chants gutturaux metallisés (spoiler : une vraie co-Hu et on ne verra rien du tout).

Zulu (c) Ronan Thenadey

Les Californiens de Zulu lancent la journée hardcore à la Warzone (d’accord, il y avait Hard Mind avant mais bien trop tôt). Et, comme trop souvent ce WE, un guitariste est absent. Ce qui ne les empêche pas de livrer un set très solide de black power violence, limitant les speeches et les interludes, nombreux sur leurs disques, pour se concentrer sur les gros breakdowns et les accélérations donnant irrésistiblement envie de faire du two-step. La bande d’Anaiah Lei dispose d’un créneau de 40 minutes mais n’en utilise que la moitié, ce que le public a du mal à comprendre. Problème technique ? Non, ils ont juste déjà joué quasiment tous leurs titres et le hardcore actuel, c’est ça : vingt minutes et puis s’en va.

Autre formation 100 % afro-américaine et revendicative, mais en Main Stage cette fois, Fever 333 est de retour au Hellfest. Et c’est… compliqué. Deux des membres du trio (guitariste + batteur) ont quitté le groupe il y a six mois en abandonnant à son sort le chanteur Jason Aalon Butler obligé de recruter une nouvelle équipe en quelques semaines (avec notamment Thomas Pridgen, ancien batteur de The Mars Volta et Thrash Talk). Malgré toute l’énergie déployée et le spectacle sur scène, certains titres s’avèrent difficilement reconnaissables (même le dernier single) alors qu’ils s’appuient pourtant énormément sur des bandes préenregistrées. Le nouveau guitariste Brandon Davis a du mal à se situer et la bassiste April Kae, qui n’a pas beaucoup de travail puisqu’il n’y avait pas de bassiste dans l’ancien line-up, vole la vedette à un Butler pourtant survolté, multipliant danses lascives et twerk infernal ( !?). Bref, c’est joyeusement n’importe quoi et ce sera what the fuck jusqu’au bout : Fever 333 joue une reprise de Blur hors sujet, Kae se roule par terre, Davis est perdu et le chanteur traverse tout le public pour finir le concert en haut de la régie sans qu’on comprenne vraiment ce qu’il essaie de faire… Musicalement, c’était très loin d’être génial mais au moins, on ne pourra pas dire qu’on s’est ennuyé.

Que faudrait-il au groupe culte holy terror/thrash metal Ringworm pour vraiment percer et avoir l’honneur d’être invité au Hellfest ? On a la réponse avec leurs clones de SpiritWorld : s’habiller en cow-boys (from hell, bien sûr). Il faut admettre que leurs costumes façon Las Vegas satanique ont de la gueule et une fois l’intro dark country expédiée, c’est parti pour quarante minutes de hardcore metal qui tabasse dur. Au micro, Stu Folstom tient la scène avec l’assurance d’un croupier démoniaque et la sélection des titres les plus efficaces de leurs deux albums fait mouche. Pas du tout original, certes, mais énorme baffe tout de même.

SpiritWorld (c) Ronan Thenadey

Grosse désillusion pour les (quelques) hardcoreux présents à Clisson puisque l’une des récentes coqueluches du genre, Mindforce, est restée bloquée à l’aéroport de l’autre côté de l’Atlantique. Il s’agissait d’une exclu du fest, donc énorme déception. Pour les remplacer au pied levé, les organisateurs se sont tournés vers les Danois de Eyes, initialement – et inexplicablement – programmés plus tard dans la journée sur la petite Hellstage située à l’entrée du site et consacrée aux groupes semi-amateurs et à diverses galéjades. Sûrement présents parce que deux de leurs membres ont joué avec LLNN la veille, ils ne se sont pas fait prier et si vous êtes lecteur régulier de new Noise (vous l’êtes, hein ?!), vous savez à quel point on a adoré leurs deux albums de hardcore metal chaotique et syncopé à mi-chemin entre Breach et Botch. Et, miracle, Eyes réussit l’exploit de faire oublier l’absence de Mindforce en donnant le concert de leur vie. Déchaînés, ils retournent littéralement un public vaguement curieux et très vite conquis. Mention spéciale au chanteur Victor Kaas qui déambule tranquillement sur toute la largeur de la scène en hurlant comme un dément. Les regards que s’échangent les musiciens entre chaque morceau en disent long sur ce qu’ils sont en train de vivre. Eh ouais les gars, vous étiez virtuellement inconnus il y a trente minutes et vous êtes en train de rallier à votre cause des milliers de personnes qui réagissent du tac au tac. Honnêtement, même si on avait bien placé leur album Underperformer dans notre top 2020, on ne s’attendait pas à un tel show.  Indiscutablement la belle histoire de ces quatre jours de festival.

Pro-Pain reste un éternel second couteau de la scène hardcore metal malgré un parcours on ne peut plus estimable. Gary Meskil (chant et basse) en est le seul membre d’origine encore actif et avant Pro-Pain et sa quinzaine d’albums (!!), il a même quasiment inventé le crossover metal hardcore avec les Crumbsuckers. Respect. Entre groove metal très 90s et hardcore 80s, le quatuor pioche dans toute la discographie du groupe pour un grand best of aussi dynamique qu’irréprochable.

Pro-Pain (c) DR

Soul-Glo n’est pas un groupe facile à décrire et, à vrai dire, pas facile à écouter non plus. Power violence, hip-hop, electro expérimental, punk… tout se mélange ici et nécessite parfois de s’accrocher. Soit vous adorez, soit c’est le rejet. Et devant un public juste venu chercher de quoi se défouler dans la fosse, l’exercice relève de l’acrobatie. Il faudrait aussi que les organisateurs préviennent les groupes que les festivaliers présents à Clisson ne sont majoritairement pas anglophones et que les longs speeches à la limite du spoken word (notamment celui où le chanteur Pierce Jordan parle de son aïeul blanc) risquent à chaque fois de tomber à plat. Impression mitigée donc, même si le très cool « Gold Chain Punk » en fin de set sauve les meubles et permet de les quitter sur une bonne note.

Comment reconnait-on un groupe qui a vraiment la confiance ? Eh bien, quand il a plus de cinq ou six albums au compteur mais consacre les deux tiers de son set de festival au petit dernier en date. C’est le cas des New-Yorkais ultra-pro de Stray From The Path qui livrent quarante minutes explosives de groove-core metal finement ciselées. Sorte de Rage Against The Machine sous stéroïdes en plus hardcore, ils savent faire bouger le public et se le mettre dans la poche. Et comme ils prêchent beaucoup de convaincus (vu le nombre de gens qui reprennent en chœur « First World Problem Child »), que le son est énorme et que tous les bons titres de Euthanasia sont passés en revue, c’est un home run. Si on regrette que certains groupes utilisent toute l’heure qui leur est dévolue, on n’aurait pas craché sur un ou deux morceaux en plus de la part de Stray From The Path puisqu’il reste bien vingt minutes sur leur créneau quand ils saluent le public avant de tout remballer…

Black Flag, tête d’affiche de cette journée à la Warzone, a droit à un excellent son. Et c’est à peu près tout ce qu’il y aura de positif à dire sur cette prestation embarrassante. Agaçante, même. Greg Ginn, seul membre historique du groupe culte de Californie, est entouré de musiciens anonymes loin de faire honneur à l’héritage immense de Black Flag. Au point qu’on a du mal à reconnaître, c’est dire, des classiques comme « Gimme Gimme Gimme » ou « Six Pack » pourtant pas bien difficiles à jouer. Résultat, ce concert est encore pire que celui des Misfits au Hellfest en 2014 (avec Jerry Only au chant). Sérieusement, il est grand temps d’arrêter ce genre de « reformation » bidon.

Carpenter Brut, local de l’étape, doit conclure la journée sur les Main Stages avec son electro metal-friendly. Pour ça, les petits plats ont été mis dans les grands. Light show dantesque, projections grand luxe, son de malade et défilé de guests (presque tous les featuring des albums avec notamment les chanteurs de The Dillinger Espace Plan, Klone et Grave Pleasures), c’est la totale. Et pendant une heure et demie, des dizaines de milliers de festivaliers dansent et headbanguent sur des nappes de synthé trippantes et des beats entêtants. Jusqu’au clou du spectacle avec l’attendue reprise de « Maniac » qui transforme le Hellfest en gigantesque karaoké à ciel ouvert. En 2023, l’un des concerts les plus marquants du plus grand festival metal de France aura été celui d’un groupe synthwave. Que voulez-vous, tout fout le camp. (Bhaine)

On commence ce samedi, à peine moins chargé en véritable fanfare de l’apocalypse, avec les Italiens de Hierophant, qui remplacent les Ukrainiens de White Ward, dans l’incapacité de quitter leur terre natale meurtrie par le gros connard du Kremlin. Si on est parfaitement honnêtes, on doit bien admettre que ce changement de line-up nous réjouit sur le strict plan musical : assez hermétiques à la proposition singulière des Ukrainiens, nous sommes en revanche ultra-séduits par la brutalité blackened death outrancière et bestiale des Italiens, et ce, depuis leurs débuts. Bref, on se régale pendant trente (petites, on a loupé le début) minutes en leur compagnie, le groupe se montrant sur-motivé, doté d’un très bon son et armé d’une setlist largement axée sur Death Siege, leur dernier album en date et sans doute le plus ouvertement black metal de leur catalogue. Le morceau-titre s’avère encore plus monstrueux sur scène que sur disque (notamment son final dantesque, qui fera ployer plus d’une nuque), de même que « Devil Incarnate » ou l’épique « Nemesis of Thy Mortals » en clôture de set. Seul regret, on aurait aimé entendre « Eternal Void », mais ce sera, on l’espère, pour une prochaine fois. On file ensuite passer du bon temps à la Warzone, où l’on se fait successivement malmener par les (très) jeunes Afro-Américains de Zulu et plus encore par les cowboys from hell (enfin Vegas quoi) de SpiritWorld, qui nous offrent un excellent workout de la zone nuque / épaules / bras tant on s’est pris environ vingt ou trente slammeurs sur la tête.

Il va sans dire qu’après tant de sueur et de bagarre, on est clairement en quête d’un peu de douceur et de wholesomeness – et accessoirement d’ombre, le soleil tapant dur en ce samedi. On porte donc notre choix sur les Britanniques de Svalbard, qui attirent une belle foule à la Temple avec leur énergique et mélodique blackened post-hardcore/screamo, portés par le plus grand sourire de la scène, celui de Serena Cherry, qui gagne aisément la palme de « personne la plus heureuse d’être là » : irradiant de bonheur et d’émotion, elle communique instantanément une joie et une énergie contagieuses à la Temple, fait chanter « bon anniversaire » à tout le monde puisque c’est le b-day du bassiste, dit que c’est l’un des plus beaux jours de sa vie – vu sa tête, on la croit -, et, accessoirement, délivre une performance impeccable au chant et à la guitare, bien soutenue par ses trois comparses, notamment un Liam Phelan habité (également au chant et à la guitare). Bref, voilà le genre de groupe qui n’est vraiment pas notre tasse de thé sur disque, mais qui nous a complètement terrassés en live : une superbe performance, et même si on est bien en peine de vous dire précisément de quoi est faite la setlist, on comprend tout de même qu’elle est très majoritairement axée sur leur dernier album en date, When I Die, Will I Get Better, sorti en 2020. Entre temps, on apprend, ô rage, l’annulation de Mindforce,  l’un des groupes de hardcore qu’on attendait le plus aujourd’hui avec Soul Glo et Zulu. Mais pas de problème, il y a tellement de groupes au Hellfest qu’il est globalement toujours possible de se démerder.

En l’occurrence, l’organisation choisit, très judicieusement il faut bien le dire, de surclasser les Danois de Eyes, qui devaient jouer sur la petite Hellstage (au beau milieu du Hell City Square) à la même heure. Notre éminente collègue Alizarine vous a dit tout le bien qu’elle pensait de leur dernier album, Congratulations (cf. le numéro 65), et si on partageait déjà son avis avant, on le partage encore plus depuis ce concert, tant les Danois, conscients de la superbe opportunité qui s’offre ici à eux (un peu comme les Allemands de Slope l’an dernier), performent à la perfection, de bout en bout. Avec une setlist justement très axée sur Congratulations, Eyes casse la Warzone et fait oublier Mindforce à toutes et tous les désappointés du jour : riffs et morceaux ultra-directs dans une veine punk-hardcore fortement infusée au noise rock, énergie folle (notamment des bons Victor Kaas et Rasmus Furbo, qu’on a vu la veille avec LLNN), et son aux petits oignons, sont les trois ingrédients de cette tarte aux claques parfaitement cuisinée et cuite à point. Les quarante minutes qui leur sont allouées passent en un clin d’œil, et on en ressort lessivés, fumants, et ravis, ce qui est généralement le signe d’un concert réussi à la Warzone. S’ensuit une pause syndicale, puis un excellent concert de Soul Glo, politique et donc courageux, mais aussi particulièrement furibard et enthousiasmant.

À peine le temps de traîner nos guêtres autour d’un apéritif bien mérité qu’on se dirige pour la première fois du week-end vers les Main Stages, pour une heure entière de Porcupine Tree. On est certes très loin de nos bases habituelles avec ce héraut du prog rock british à lunettes, mais que voulez-vous, on est tombés dans la marmite In Absentia quand on était ado, et c’est, depuis, le seul groupe de prog qu’on peut écouter plus de dix minutes sans avoir la vision qui se trouble, les dents qui grincent, et l’envie de travailler le claviériste de Dream Theater à la flamme bien moyenâgeuse sur fond de Cannibal Corpse. De plus, on ne les a jamais vus et cette date est, comme ne manque pas de nous le faire remarquer un Steven Wilson mi-goguenard mi-soulagé de l’accueil très positif qui leur est réservé, leur seul festival « metal » de toute l’année. Bref, on y est jusqu’au cou, et on ne le regrettera pas un seul instant tant la setlist nous régale, le groupe est en maîtrise totale et le son impeccable. On est avant tout là pour avoir du In Absentia, et, ô joie, le groupe en joue les trois meilleurs extraits : « Blackest Eyes » en ouverture, la superbe « The Sound of Muzak », et évidemment le tube « Trains » en clôture, ce qui nous colle, on le dit sans honte, la larme à l’œil, et de sacrés frissons : quel pied. Le reste de la setlist nous emballe un peu moins, même si on est (très) contents d’entendre « Open Car », dont on sent que le groupe l’a un peu sorti du placard pour l’occasion parce qu’il s’agit d’un de ses morceaux les plus « metal », mais on survit au fleuve « Anesthetize » (quand même un sacré morceau), et on dodeline agréablement du chef sur les trois ou quatre extraits du dernier album, Closure / Continuation (notamment « Harridan »). L’un dans l’autre, un excellent moment avec Messieurs Wilson, Harrison et Barbieri (et leurs deux brillants musiciens live, Randy McStine à la guitare/chœurs, et Nate Navarro à la basse), qui nous sort agréablement de nos habituelles bourrinades d’Altar/Warzone.

Mais toutes les belles et intelligentes choses ont généralement une fin rapide au Hellfest, et il est temps de s’en retourner vers d’autres au QI plus proche du négatif, surtout après de tels déluges de notes. Ça tombe bien, il est 20h40, les vétérans de Stray From The Path sont sur le point de casser des bouches de l’autre côté du site . Typiquement le genre de groupe que l’on n’écoute que d’une oreille très distraite sur disque tant leur hardcore « accessible », borderline rap-metal / neo metal (voire les deux pieds dedans) peine à retenir notre attention depuis Rising Sun, mais qui, sur scène, mérite toujours le déplacement. Leur expérience est indéniable – dix albums, plus de vingt ans de carrière -, leurs morceaux sont simples, mémorisables, leurs paroles engagées contre toutes les formes de discrimination et les violences policières font mouche, ils collent des moshparts assez redoutables absolument partout. Bref, voici l’archétype du groupe qui cartonne systématiquement en début de soirée en festival, et ils sont chez eux à la Warzone. Ils mettent d’ailleurs un zbeul qu’on n’avait pas vu depuis Terror l’an dernier, des vagues de slammeurs et slammeuses assaillant sans relâche les crash barriers et faisant mériter leurs salaires aux équipes de sécurité. Bref, une performance de haut vol, notamment de la part du frontman Andrew Dijorio et du batteur Craig Reynolds, qui tiennent de toute évidence une forme olympique.

(c) Ronan Thenadey

Un repas et quelques verres plus tard, on se demande un peu, running-order en main, ce qu’on va bien pouvoir faire pour patienter jusqu’à Meshuggah. C’est donc davantage par curiosité, et par volonté de consolider notre culture des musiques extrêmes, que par véritable passion pour le groupe, qu’on se rend dans une Altar – à moitié vide, il faut bien le dire -, pour voir Voivod. Si on connait relativement mal la discographie du groupe, on sait par contre très bien la place singulière, et importante, qu’il occupe au sein de la scène metal en général, et thrash en particulier. Et après une heure passée en leur compagnie, on comprend beaucoup mieux pourquoi : quelle usine à riffs ! En toute honnêteté, on est soufflés par la qualité des compositions et par la dynamique des morceaux, qui nous semblent sonner bien plus puissamment que sur disque. On a, en revanche, toujours autant de difficultés avec le chant de Snake (sans doute l’élément qui nous a le plus empêchés de devenir un fan invétéré du groupe), mais le vieux briscard s’avère tout de même à son aise : très attachant et particulièrement heureux d’être là, il délivre une performance solide. Le reste du groupe est impeccable sur le plan de la technique et de l’énergie, notamment un Michel Langevin dont on peine à croire qu’il a soixante ans tant il maltraite ses fûts en toute décontraction. Petite cerise sur le gâteau, mais dont on comprend qu’il s’agit en fait d’un (très) grand moment pour les fans du groupe, Eric Forrest (qui avait remplacé Snake au chant entre 1994 et 2001) vient chanter « Rise », issue de l’album Phobos, en duo avec Snake. S’agissant du reste de la setlist dont, en toute transparence, on n’a pas reconnu un cinquième sur le moment, on constate a posteriori qu’elle avait des allures de best of traversant toute la carrière du groupe, près de dix albums différents étant représentés. Au total, un très chouette moment alors qu’on n’en attendait vraiment pas grand-chose.

On s’octroie ensuite une dernière pause / power-nap nocturne, car il s’agit d’être en forme pour subir, une heure durant, les impitoyables assauts mécaniques des pontes de Meshuggah. C’est, contrairement à Voivod, un groupe que l’on connait par cœur, qu’on a déjà vu sept ou huit fois, et qui ne nous a littéralement jamais déçus, ni sur disque, ni en concert. C’est dire toute l’estime qu’on leur porte depuis le jour béni où on a posé nos oreilles sur Destroy Erase Improve. Et à nouveau, la magie destructrice du groupe va opérer : on arrive franchement rôtis, en galérant à mort pour parvenir jusqu’aux premiers rangs car l’Altar est pleine comme un œuf (une sorte de double effet « tête d’affiche unanimement respectée + les très populaires The Hu qui finissent leur set dans la Temple adjacente et dont le public déborde largement dans l’Altar »). Et pourtant, dès les premières notes de « Broken Cog », terrassant premier morceau d’Immutable, on est une fois de plus pris dans leur danse désarticulée, leurs riffs inhumains, leur groove insensé, et leurs ambiances extraterrestres. Il faut d’ailleurs, à ce propos, dire un mot de la scénographie, car c’est clairement la plus impressionnante qu’on ait vue de leur part : des backdrops aux lightshows, tout est exceptionnel de classe et de maîtrise, et renforce évidemment l’immersion de plusieurs crans. Il faut également dire un mot sur le son : dantesque. Reste la performance du groupe lui-même : un roc collectif, une machine de guerre impossible à dérégler, comme à leur habitude. Aucune faille technique, et un charisme tranquille, notamment celui d’un Jens Kidman qui vieillit incroyablement bien et communique de plus en plus avec le public. Tout ceci nous renvoie l’impression d’un groupe qui, loin d’être dépassé alors qu’il franchit tranquillement la barre des trente-cinq ans de carrière, est en réalité dans son prime et au faite de sa domination. La setlist, pour finir, parfaitement équilibrée, fait évidemment la part belle à Immutable (« Broken Cog », « Ligature Marks », « The Abysmal Eye »), mais aussi d’intelligents détours par presque tous leurs autres disques : Catch 33 (« In Death – Is Death », « In Death – Is Life »), Koloss (« Demiurge »), Nothing (car que serait un concert de Meshuggah sans « Rational Gaze »), The Violent Sleep of Reason (« Born in Dissonance »), et, sans surprise, Destroy Erase Improve avec « Future Breed Machine » en clôture. Alors bien sûr, l’heure s’écoule en un clin d’œil et on en aurait bien repris pour quinze ou trente minutes, histoire d’avoir droit à « Do Not Look Down », « Bleed », « New Millenium Cyanide Christ » et quelques autres, mais ne boudons pas notre plaisir : tant de groupes de metal essentiels n’atteignent même les trente-cinq ans de carrière, ou y arrivent tellement cramés qu’ils n’ont plus guère d’autre moyen d’exister que la nostalgie. Meshuggah, à l’inverse, demeure pertinent, plus vivant et créatif que jamais, et ultra dominateur sur scène, le tout avec un line-up inchangé depuis près de vingt ans : à ce niveau, ça relève presque du miracle. Pourvu que ça dure, et bon courage aux groupes du lendemain, dernier jour de ce Hellfest 2023, pour se mettre à leur niveau. (Romain Lefèvre)

King Buffalo (c) Ronan Thenadey

La journée du samedi commence pour nous par un mauvais timing et on rate le show de Zulu à la Warzone, mais on arrive à temps pour assister à la Valley à celui de King Buffalo, formation stoner psyché-blues que l’on ne connait que de réputation et dont on nous a dit le plus grand bien. Et effectivement le concert s’avère tout bonnement excellent et salué par un public célébrant chaque titre l’un après l’autre. La musique hypnotique et tout en montée développée par le trio new-yorkais se prête parfaitement à ce début d’après-midi ensoleillé et on se laisse porter puis rapidement séduire par une performance en apesanteur et gorgée de mélodies rayonnantes. Et si le groupe communique assez peu avec le public, il ne cache pas son plaisir d’être là et de recevoir un tel accueil. La complémentarité entre les trois musiciens est exemplaire et à une section rythmique roborative et souple répond le jeu de guitare ingénieux et cristallin de Sean McVay, frontman tout en retenue, que l’on penserait presque timide, mais qui tient son rôle sans trop en faire et chante divinement bien. Nous sommes venus en curieux et repartons en bon fan avec l’assurance de se pencher au plus tôt sur la discographie de ce groupe en tous points attachant.

Après s’être pris une énorme mandale avec le set hardcore metal dévastateur de Spiritworld à la Warzone, retour à la Valley sous un soleil harassant pour voir une énième fois le doomcore de Crowbar. Mais s’il y a du monde face à Kirk Windstein et ses sbires, le public se montre tout de même quelque peu apathique et le frontman essaiera bien de motiver la foule en la haranguant mais sans grand succès. Certes tout reste propre et bien exécuté, mais on peine à se passionner pour un set mêlant extraits du dernier album en date et classiques-maison. Alors, peut-être est-ce la lassitude qui pointe après avoir vu le groupe un nombre conséquent de fois, seulement, à en croire le peu de réactions du public, on en vient à se dire que nous ne sommes pas les seuls à trouver le show sympathique mais un peu trop en pilotage automatique.

On continue nos allers-retours entre la Warzone et la Valley (une brillante idée que d’avoir rapproché ces deux scènes) et on quitte le hardcore furibard d’Eyes pour s’en aller découvrir Grandma’s Ashes, trio féminin qui dispense une sorte de doom aux relents prog et bluesy. Remplaçant les Ukrainiens de Stoned Jesus, la formation parisienne qui défend ici son premier album sorti il y a quelques mois souffle un peu le chaud et le froid, entre des passages accrochant bien l’oreille grâce à des riffs élégants et d’autres moins emballants et tirant trop en longueur. Le groupe profite de sa prestation pour pointer l’absence et le manque de visibilité des musiciennes sur le festival, chiffre à l’appui. On suit le set sans déplaisir, mais les morceaux  nous semblent pour le coup mieux fonctionner sur disque que sur scène où ils perdent quelque peu de leur puissance et de leur magnétisme. À revoir sûrement dans d’autres conditions même si Grandma’s Ashes n’a pas à rougir de sa performance, preuve en est l’accueil chaleureux dont il a bénéficié de la part d’un public en grande partie néophyte.

The Obsessed (c) Ronan Thenadey

Pour se remettre les idées en place après le set bien azimuté de Soul Glo à la Warzone, direction la Valley pour célébrer proprement la venue des légendes de The Obsessed après leur annulation de 2019. Alors, « légendaire », assurément à nos yeux, mais pas pour tout le monde semble-t-il si on en juge par le faible public devant lequel le groupe monte sur scène. Les choses s’améliorent tout de même au fur et à mesure du set et le show se finira face à un public somme toute relativement conséquent. Le quatuor est en grande forme et nous gratifie d’une prestation remarquable et très énergique où il alterne les classiques de ses trois premiers albums et des morceaux de son dernier et excellent Sacred de 2017. Le son est clair et puissant, mettant parfaitement en valeur les qualités musicales des quatre interprètes avec notamment un Wino très en voix et qui tient parfaitement son rôle de frontman de premier ordre. Il nous aura fallu attendre des années avant de voir enfin The Obsessed en concert et le moment n’en est que plus délectable, ce set d’une grande classe répondant parfaitement à nos attentes en matière de doom et de heavy rock 70s.

On garde encore en mémoire la précédente venue de Pro-Pain au Hellfest en 2014. Le groupe y avait joué à la Warzone face à un parterre pour le moins clairsemé, tout le monde s’étant rué voir le set d’Iron Maiden pour sa première visite au festival. Et pourtant, Gary Meskil et ses collègues de baston avaient alors tout donné, offrant un show d’une intensité folle et bourrin au possible. On s’était régalés et c’est donc avec une certaine excitation que l’on se rend en ce samedi à la Warzone qui, et cela fait bien plaisir à voir, est bien remplie et compacte pour accueillir les New-Yorkais. Loin de jouer la carte du fan-service dont le principe aurait été de concentrer la setlist sur ses classiques 90s (soit les trois premiers albums), Pro-Pain pioche allègrement dans toute sa discographie et sa quinzaine d’albums pour un concert ultra rentre-dedans qui met le feu au pit avec un public très réceptif et donc très réactif. Le groupe enchaîne les titres sans pause, emmené par un Meskil conquérant et visiblement très heureux du bordel qu’il est en train de foutre. On regrette néanmoins que le groupe fasse ce soir l’impasse totale sur son premier album, qu’il ne propose qu’un extrait du second et du troisième (« Shine » et « Make War Not Love » pour clore le show) et qu’il ne se penche pas avec plus d’insistance sur ses deux derniers disques en date, The Final Revolution et Voice of Rebellion, qui débordent de titres vraiment excellents. Pour autant difficile de faire la fine bouche face à une telle débauche d’énergie et de brutalité maîtrisée : Pro-Pain n’a fait là aucun prisonnier, délivrant un set exemplaire et d’une absolue efficacité.

On se dirige ensuite vers la Valley pour assister au show de Monster Magnet. Le quintette est attendu de pied ferme par de nombreux aficionados prêts à recevoir leur dose de stoner / heavy rock hi-energy. Dave Wyndorf et sa clique montent sur scène et attaquent leur set de façon surprenante par une reprise de Hawkwind suivie de « Superjudge ». La puissance de feu de Monster Magnet ne s’est pas émoussée depuis la dernière fois que nous l’avons vu au Hellfest en 2017 et la formation va embraser le public avec un savoir-faire qui n’est plus à démontrer. Passé ces deux titres introductifs, le groupe concentre l’intégralité de sa setlist à ses deux albums les plus réputés, Dopes To Infinity et Powertrip. Clairement, Monster Magnet joue sur du velours et nous fait chavirer au son de « Crop Circle », « Look To Your Orb for the Warning », « Negasonic Teenage Warhead » et « Spacelord ». Les tubes se suivent et Wyndorf assume son rôle de maître de cérémonie avec un charisme et une classe folle, faisant peu usage de sa guitare qu’il gratte de façon très parcimonieuse laissant le champ libre à Garrett Sweeny et Phil Caivano pour que ces derniers s’en donnent à cœur joie et nous abreuvent de riffs imparables. Le set passe vite, trop vite et la qualité de la prestation est d’un tel niveau que l’on en redemande. Assurément, l’un des meilleurs concerts du festival (comme à chaque fois que le groupe y joue).

Sitôt le set de Monster Magnet terminé, on se rend à la Warzone pour voir ce que Black Flag peut bien donner en 2023 avec tout de même une certaine appréhension. En effet, le groupe est aujourd’hui constitué d’une nouvelle section rythmique composée de deux jeunes inconnus, de la légende du skate Mike Vallely au chant et enfin à la guitare de Greg Ginn, unique membre originel. Et c’est la catastrophe : on a davantage l’impression d’être en présence d’un mauvais tribute-band qu’autre chose. Le groupe ne dégage aucune énergie, le son manque cruellement de puissance et les chansons sont massacrées. Ginn a l’air d’avoir désappris à jouer et Vallely, même s’il fait ce qu’il peut, n’arrive pas à sauver les meubles de ce naufrage. Pourtant, le groupe interprète ses plus gros classiques (« Nerveous Breakdown », « My War », « Gimmie Gimmie, Gimmie », « Black Coffee », « Jealous Again », « Rise Above »), mais rien n’y fait, le set semble interminable et la Warzone, déjà guère remplie à la base, se vide au fur et à mesure. Un coup d’épée dans l’eau et la vraie douche froide de cette journée.

Ce samedi se termine pour nous en apothéose avec le show monstrueux de Carpenter Brut sur la Main Stage 1. On se souvient encore avec émotion de son concert ébouriffant donné à la Temple en 2018 et de l’ambiance euphorisante qui régnait alors sous le chapiteau. On retrouve ce soir la même excitation dans l’air alors que le show débute par l’« Opening Title » de Leather Terror suivi aussitôt par l’explosif « Straight Outta Hell » qui embrase le public, la fosse devenant en quelques secondes un dancefloor géant. Le light-show est énorme et les projections-vidéos participent à l’effet immersif et transcendantal du spectacle qui nous est offert. La symbiose entre Franck Hueso aux commandes, Adrien Grousset à la guitare et Florent Marcadet à la batterie est totale et le trio impressionne de par sa précision et sa puissance de feu. La formation enchaîne ensuite sur « The Widow Maker », avec Alex Westaway de Gunship, premier invité à donner de la voix. On se posait la question avant le concert de qui serait présent ce soir parmi tous et toutes les chanteurs et chanteuses ayant participé aux albums de Carpenter Brut. Eh bien, beaucoup de monde, bien plus qu’espéré même : Mat McNerney (Grave Pleasures) pour « Beware The Beast », Persha pour « Lipstick Masquerade », Greg Puciato pour « Imaginary Fire » et Johannes Andersson (Tribulation) pour « Leather Terror ». Ils sont tous là, offrant à ce concert intense des airs d’évènement unique et magique. Si la setlist se concentre plutôt sur le dernier album, Leather Terror, avec pas moins de huit extraits, Carpenter Brut prend le soin de faire le tour de sa discographie avec deux titres pour chacun de ses trois EP et trois morceaux de Leather Teeth. Le show se clôt inévitablement et en beauté par la reprise que tout le monde attendait de « Maniac », interprétée par Yann Lignier (Klone) en duo avec Persha. Après cette immense claque et alors que la pluie s’invite  timidement, on quitte le site en espérant que la météo sera clémente le lendemain.  (Bertrand Pinsac)

Quelques heures avant la fantastique prestation de Meshuggah, il convient de saluer le très bon concert donné par les Bordelais de Gorod sur la scène Altar. Le death metal progressif et technique des Aquitains se révèle particulièrement inspiré et volatile, dans le sillage du touché épidermique des guitaristes Mathieu Pascal et Nicolas Alberny qui transportent littéralement des titres comme « Breeding Silence « ou l’étonnant « We Are the Sun Gods » avec ses passes de picking aux consonances electro/jazz étranges. L’harmonie dans la torture en quelque sorte, pour paraphraser le titre d’un des morceaux de leur premier album, Neurotripsicks.

Sur la scène Valley, on apprécie à sa juste mesure le délié intense des trios américains King Buffalo et Earthless. Chez les premiers, le charisme magnétique du guitariste/chanteur Sean McVay permet au groupe d’alterner avec un sens de la transition toujours sur le fil du rasoir, parties planantes mélodiques et coup de jus électrique bien sentis. Les ambiances façonnées par le mélange de riffs saignants et d’intermèdes tout en apesanteur et en syncopes rythmiques de « Mammoth », « The Knocks » ou « Shadows » évoquent un creuset intense entre musiques heavy, psychédéliques et progressives particulièrement bien dosé chez le groupe de Rochester. Chez les seconds, la tendance est nettement plus à la jam psychédélique et instrumentale, mais l’effet sensoriel s’avère tout aussi emballant. Les longs solos hypnotiques du guitariste Isalah Mitchell évoquent une virée cosmique d’un Santana qui se serait perdu dans une desert party californienne avec Kyuss. Les vibrations clairement ésotériques de titres comme « Night Parade of One Hundred Demons » ne laissent d’ailleurs que peu de doutes sur la portée doom/stoner/psyché tellurique d’une cabale sonique pour laquelle on signerait avec son sang.

Une certaine transition stylistique serait-elle en train d’opérer au Hellfest ? Quand on voit le peu d’audience drainée par certains groupes de thrash ou de death « historiques » (Holy Moses, Dark Angel, Benediction…) sur les scènes Altar et Temple, et comparativement la hype populaire pour des formations plus « exotiques » comme les Tunisiens de Myrath ou les Mongols de The Hu, la question se pose en tout cas. Nul doute qu’un peu de fraîcheur et de rotation dans la programmation est un moyen opportun d’élever le potentiel attractif autour d’un genre metallique dont on ne cesse de constater le caractère évolutif et modulable ces dernières années. Mais s’agit-il dans ces choix de programmation de louer la qualité musicale intrinsèque des groupes ou de tromper l’ennui d’un public blasé, désireux d’assister avant tout à des spectacles variés, « qui changent » ? Si le potentiel technique du chanteur Zaher Zorgati et de ses instrumentistes n’est pas à remettre en cause, le côté kitsch du heavy metal mélodique typé « conte des mille et une nuits » de Myrath a toutes les allures d’un show de cabaret : danse du ventre, combats de sabres et fakirs magiciens participent activement à ce qui ressemble à une habile retranscription, dans un autre univers géographique, du décorum habituel du heavy metal. Après tout, pourquoi pas ? Du côté des Mongols de The Hu, le son de la steppe et les instrumentations à cordes frottées à l’archet servent de base à des morceaux typés heavy/thrash ou hard rock/bluesy, mais agrémentés des scansions gutturales caractéristiques du chant local. Là aussi, on peut trouver la formule opportune ou réussie – ou les deux – selon le degré d’intérêt qu’on a pour cette opération de greffe culturelle. Une chose est certaine, déplacer ces formations sur les Main Stages semble prioritaire tant la tendance au succès croissant de ce genre d’artistes auprès du public s’avère elle incontestable.

Pour cette tournée Future Past Tour, les légendaires Iron Maiden ont choisi de mettre en valeur leur récent album Senjutsu et le plus ancien Somewhere in Time de 1986, et sa tonalité sci-fi/futuriste orientée Blade Runner. Un choix qui a le mérite d’offrir une setlist garnie de morceaux rarement ou pas encore joués en live ces dernières années. À ce titre, les « Caught Somewhere in Time », « Stranger in a Strange Land » ou « Can I Play with Madness ») de la période Somewhere in Time résonnent avec un intérêt un brin nostalgique pour les plus anciens, d’autant plus que la part accordée aux classiques habituels du groupe est réduite à la portion congrue – seuls « Iron Maiden », « The Prisoner » et « The Trooper » y trouvent place tandis que disparaissent des incontournables comme « Aces High », « Two Minutes To Midnight », « Run To the Hills » ou « The Number of the Beast ». Parmi ceux retenus de ce disque souvent mésestimé dans la décennie magique, la présence d’« Alexander The Great » est d’ailleurs presque une nouveauté, puisque c’est la première fois que le groupe joue ce titre en tournée. Concernant les pièces du dernier album, on est plutôt agréablement surpris de voir qu’elles tiennent la route sur scène. « The Writing on the Wall », « Days of Future Past », « The Time Machine » ou « Death of the Celts » transposent leurs facettes épiques, heavy et mélodiques, dans la veine de ce que Iron Maiden sait et doit fournir in vivo. Finalement, c’est plutôt l’aspect show en lui-même qui marque un petit bémol. Grimé en réplicant géant, Eddie ne sort de sa tanière qu’à de rares moments, pour un combat tronqué avec Bruce Dickinson, rivé derrière sa mitrailleuse factice. Ce dernier manque d’ailleurs un peu de souffle désormais (ce qui peut s’avérer compréhensible après tant d’années) sur certains titres et n’agite même plus son union jack au gré de ses courses sur « The Trooper ». Ses efforts – louables – pour parler français cassent aussi un peu le rythme du concert tant ils cherchent parfois ses mots. Chez les autres musiciens aussi, l’occupation de la scène semble moins alerte qu’avant. Et la batterie de Nicko McBrain est tellement planquée dans la scénographie étroite qu’on la voit à peine. Pas de quoi remettre en question la légitime couronne de Maiden sur un univers heavy metal qu’ils ont largement contribué à parfaire ses quarante dernières années, mais de quoi se dire que la pente descendante est peut-être bientôt en vue.  (Laurent Catala)

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